Gagner du temps, en le perdant





Pièce à conviction 101



Manifeste pour respecter la culture

Tout-e citoyen-ne devrait vouloir (pouvoir) obtenir des conditions de vie décentes et tout-e citoyen-ne devrait vouloir (pouvoir) le respect de ses droits humains fondamentaux. Ceci étant dit, il y a une catégorie de gens qui, selon toutes les apparences, désire obtenir ni plus ni moins que rien. Mais rien, c'est impossible, c'est ce que vous pourriez croire. Examinons pourquoi ces gens en sont venus à ne rien désirer. Effectivement, le fait de favoriser l'exercice et le respect des droits humains devrait transparaître dans les structures même de la société et d'une manière permanente, puisque nous l'avons convenu. Du moins, c'est ce qui apparaît quand une société affirme et affiche ses valeurs. À moins de réduire la démocratie à une minorité au pouvoir, effectivement, une société se détermine par un plus grand nombre d'individus. Ainsi, bien évidemment, tout-e citoyen-ne devrait bénéficier, qu'il ou qu'elle le veuille ou non, dans notre société, des mêmes droits et libertés tels que définis dans les lois et les chartes qui furent adoptés par l'ensemble des indidus qui compose cette société.

Comme on le constate régulièrement, bons nombres de politiciens et politiciennes d'aujourd'hui sont très influencé-es par l'objectif de la rentabilité à tout prix, ce qui a pour effet une forte tendance à augmenter les budgets militaires (pour la guerre permanente) et à diminuer les budgets culturels (pour la culture éphémère). Ils et elles croient que la population pense encore de façon générale que la culture c'est inutile et que ceux et celles qui y travaillent ne gagnent pas leur vie honorablement comme c'est le cas pour tous les autres métiers, y compris celui de les représenter : la raison d'être des politiciens et politiciennes. Ainsi à ce train où vont les choses présentement, effectivement, on va accorder de moins en moins d'attention, de disposition favorable à la culture et aux artistes, et on va renforcer cette idée selon laquelle on peut se passer de la culture et des artistes, alors qu'on ne peut pas se passer de la guerre et des soldats pour l'économie et les emplois et des politiciens pour gérer tout ça. On s'achemine lentement et sûrement vers ce rien que bon nombre d'individus vivent quotidiennement, étant de plus en plus à être solidaires du rien.

Vous aurez compris que ces gens qui vivent de rien, qui ne disent rien sont exclus, marginalisés et stigmatisés par cette situation du rien, c'est-à-dire la précarité, la pauvreté, les quadruples tâches mal rémunérées, tout ça pour continuer à exister et à créer en toute liberté (disent-elles, disent-ils). Tout ça pour rien. Le système fiscal et les programmes sont basés sur une notion de rentabilité du produit culturel. On comprendra également que ce qui est rentabilisable est probablement culturellement acceptable (rires, sexe, sport, sang des autres ?). Vous voyez que le rien crée cette béance sociale et ce n'est pas illusoire. Des milliers d'artistes y sont jetés quotidiennement à ne vouloir rien savoir de ce rien, de même que les populations, qui, selon les croyances des politicien-nes, ne veulent rien savoir des artistes à moins que ce soit gratis. Par ailleurs, les populations ne se soucieraient pas tellement plus de savoir où vont leur contribution de citoyen-ne, à quelle culture et quelle économie, ou à quel endettement ont-ils contribué cette année? Vous avez payé telle activité sociétale avec vos impôts, avez-vous vraiment fait ce choix, et particulièrement en ce qui nous concerne présentement, ce choix du rien pour un bon nombre d'entre nous.

Personnellement, je crois que les artistes contribuent de façon extraordinaire au développement endurable de la société et je suis encore toute étonnée et je le resterai toute ma vie, de ce rien dont ils sont affublés et qui plus est, surtout en dehors de l'industrie culturelle et de ses règles, qui elles aussi excluent, marginalisent et stigmatisent. Dans ce tout du rien, il y a des bénévoles obligatoires, des organismes communautaires limités, des diffuseurs gratuits ou à très bas prix, des publics consommateurs délinquants défavorisés; plutôt que de ne rien faire, ne rien connaître, ne rien ressentir. Un accommodement déraisonnable pour la passion, la qualité de la vie, la spiritualité, les plaisirs des émotions, du coeur et de l'esprit, pour le développement et l'accès à la culture! Mais voilà le hic, personne ne s'en sortira comme ça, mine de rien, c'est récupérable et profitable ailleurs où c'est impérialistement toujours meilleur. Ce régime du grand rien ne donne rien qui vaille j'en conviens. Choisir de respecter sa culture, de se respecter en tant qu'artiste, de respecter sa liberté de créer, de respecter sa création, de se respecter en tant que citoyen-ne ayant droit à des conditions de vie décentes et de respecter la diversité des cultures est une tendance tellement radicale, en ce moment où tout est à propos de rien.

Je ne peux rien dire de plus finalement, je suis bouche béante, un rien me va, n'est-ce pas, tandis que rien ne va plus! Évidemment qui risque rien, n'a rien.

Sylvie Chenard :) 15 avril 2007


Sylvie Chenard / projetsdelabaleine arobase gmail point com 

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